
En ce début d'année, l'ENVSN a accueilli le colloque des directeurs de course, organisé par la FFVoile. Pour nous parler de cet événement assez rare (tous les deux ans seulement), nous avons interviewé Henry Bacchini, vice-président délégué de la fédération et Christian Le Pape, directeur du pôle course au large de Port-la-Forêt, organisateurs de ce regroupement, en charge de la commission "course au large".
Les objectifs dU colloque
HB : Les premiers directeurs de course sont entrés en fonction vers 1995-1996, la fédération s'est aperçue qu'il y avait besoin de légiférer, de formaliser certaines règles dans le domaine de la course au large, ce qui a donné lieu à la création de la commission "course au large" en 2006. Depuis, tous les deux ans, on fait un bilan qui permet à la fois de se "rafraîchir" les idées et de s'adapter à l'évolution des techniques. Les bateaux changent, les dispositifs de surveillance et de sécurité évoluent, on se remet à niveau et c'est aussi un grand moment d'échanges entre les directeurs de course.
CLP : On a un programme équilibré : des interventions "magistrales" avec des experts de différents domaines: météo, médical, réglementation et des moments de discussion sur les aspects opérationnels des compétitions entre les directeurs de course.
Découvrir le programme :
Les 15 directeurs de course habilités par la fédération sont présents ainsi que leurs adjoints (environ 10) qui sont invités pour la première fois au colloque. On trouve parmi eux Jacques Caraës, (directeur de course du Vendée Globe et de la Route du Rhum), Francis Le Goff (Transat Jacques Vabre, Solitaire du Figaro), Denis Hugues (Minitransat), Christophe Gaumont (Tour Voile, Spi Ouest-France).
Le rôle de la FFVoile dans la course au large, le modèle français
Le rôle de la FFVoile est défini par la loi. En tant que fédération délégataire, elle a deux obligations :
-La représentation internationale de la France : sélectionner les athlètes dans les grandes épreuves telles que les Jeux Olympiques
-L'organisation d'un calendrier sportif d'épreuves aussi bien de kiteboard que de course au large. C'est donc dans ce cadre que la FFVoile établit avec les différentes classes (Imoca, Ultimes, Figaro, mini...) le calendrier et l'organisation des courses au large.
L'organisation comprend notamment le règlement sportif et la sécurité. Autrefois, l'administration des Affaires Maritimes était chargée de la vérification de la conformité des bateaux sur le plan de la sécurité. Aujourd'hui, cette tâche incombe à la fédération, qui a créé une nouvelle discipline d'arbitrage: le contrôle d'équipements de course au large.
HB : La France a une organisation particulière qui sert de modèle au sein de la fédération internationale (World sailing), on est en avance en structuration par rapport à d'autres fédérations, notamment sur l'organisation de course en double et en solitaire. Le modèle français a été copié par les espagnols pour l'organisation de la Barcelona World race. L'arrivée de la course au large aux Jeux Olympiques va certainement faire évoluer les choses au sein de World sailing.
Le rôle du directeur de course
Le directeur de course est recruté et rémunéré par l'organisateur de la course parmi les personnes listées par la FFVoile. Le directeur de course exerce en pleine responsabilité, il est l'interlocuteur des organisateurs, des autorités maritimes et de la fédération. cf site de la FFVoile
La présence d'un directeur de course est exigée pour toutes les compétitions représentant un certain niveau de risque ou qui se disputent en équipage réduit, solitaire ou double...ce qui représente 30 épreuves sur les 7600 du calendrier fédéral.
Selon la nature des compétitions, leur durée, leur parcours, le type de bateaux utilisés, la difficulté et les conditions prévisionnelles de déroulement, les compétitions nécessitant la présence d’un directeur de course au large sont classées en type « A » ou « B ». Les compétitions de type « A » sont généralement des compétitions de course au large, en équipage ou en solitaire, pendant la durée desquelles les bateaux sont en autonomie totale pour une ou plusieurs périodes de plusieurs jours, sans possibilité pour le directeur de course au large d’assurer une surveillance visuelle ou d’organiser une assistance rapide. Les compétitions de type « B » sont des compétitions de nature complexe ou spécifiques, au large ou côtières, au cours desquelles les bateaux ne sont pas en autonomie totale et peuvent faire l’objet d’une surveillance visuelle ou d’une assistance rapide. (extrait du règlement fédéral)
Jusqu'en 1995, cette fonction était exercée par un arbitre fédéral qui était le président du comité de course, et qui assurait les deux rôles. La majorité des arbitres étant bénévoles, la fédération a décidé de ne pas faire porter trop de responsabilité à ces bénévoles qui donnent le départ, jugent les arrivées, comme c'est prévu dans les règles de la fédération internationale. La sécurité et le suivi des navires sont dorénavant placés sous la responsabilité de la direction de course, qui peut notamment déclencher des opérations de secours. Le directeur de course reste sous l'autorité de la fédération, sur laquelle il peut s'appuyer en cas de besoin.
HB : Un bon directeur de course échange avec le président du comité de course, le président du jury. La dérive potentielle, ce serait que ce soit le sponsor, l'organisateur ou le maire de la ville de départ qui prenne les décisions, le contrôle de la course, alors qu'ils ne sont pas dans l'organisation sportive.
CLP : C'est cette indépendance du directeur de course que l'on recherche. Si jamais on n'a pas les garanties que des décisions qu'il a pu prendre ne l'ont pas été en toute indépendance, objectivité et cohérence, il risque de perdre son habilitation. La fédération n'est pas du tout dépendante des sponsors, des écuries ou des skippers, même les plus emblématiques. Son rôle se résume ainsi : préparation, organisation et suivi de la compétition pour laquelle il est habilité, il a toute les responsabilités. Si jamais on considère qu'il ne les a prises, qu'il a commis des erreurs ou des négligences, on peut lui enlever son habilitation.
Un profil particulier
Le directeur de course est le plus souvent animé par la passion de sa discipline. Il doit avoir des compétences particulières, faire preuve d’altruisme, avoir du charisme. Il s’agit pour la plupart d'anciens bons marins qui ont la volonté de partager.
A suivre, l’interview de Jacques Caraës qui réunit, sans nul doute, toutes ces qualités.